Réflexions sur les expositions, les exposants...

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garoundea
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Réflexions sur les expositions, les exposants...

Message par garoundea »

Texte de F.HAYMANN DE LA REVUE ANIWA

"Je n'ai pas résisté au plaisir de coller ce texte de F.HAYMANN paru sur le site d'aniwa , pour sa pertinence nos convergences de vue et d'analyses. Les textes et titres en gras sont de moi.




Je veux de la graine de champion… » : petit florilège

Record woman : la femme aux « 1000 titres »
Aujourd’hui, l’éleveur qui détient le record du monde de titres de champions homologués est une Américaine. Dans ce pays où le titre de Champion AKC (American Kennel Club) est distribué à des milliers d’exemplaires chaque année, elle élève des Schnauzers nains et des Riesenschnauzers. Elle revendique de façon tout à fait officielle plus de 1000 titres de champions homologués pour des chiens, élevés, importés ou vendus par ses soins. Un chiffre qu’aucun éleveur européen n’approchera un jour, la barre des 100 titres représentant en Europe, un record déjà historique !


Le collectionneur d’étalons champions. Un Champion, oui, qui fasse des saillies, oh oui !

La valeur intrinsèque (ou mouillée comme disait Coluche) d’un champion passe également par ses dons d’étalon reproducteur.

En Europe, dans certaines races, allemandes notamment, des champions qui cumulent les victoires et les titres de champion, font l’objet de transactions proches de celles que nous connaissons dans le milieu équestre (de l’ordre de centaines de KF). En Boxer, le Président du Club du Boxer espagnol fait partie de cette confrérie que nous appellerons, les collectionneurs d’étalons champions. Il a fait l’acquisition de « cracks » comme David Del Colle dell’Infinito (un bringé qui ne compte plus les femelles venues à lui ces cinq dernières années), Saverio de Soragna, Nick de Ruphète, etc.

Le culte du « business » de l’étalonLes cumulards sur le circuit se font avant tout plaisir. Nous connaissons des « collectionneurs » qui ne sont pas éleveurs et qui dépensent des sommes folles pour avoir l’exclusive de posséder « le chien le plus titré du monde ». Mais le plaisir peut se rémunérer également : certains étalons vedettes (Rottweiler, Berger Allemand, Labrador, Saluki, etc…) disposent de leur propre site web, un outil qui leur permet de toucher d’un seul clic toute la planète. Ils proposent leurs services (par IA et envoi de semence congelée) moyennant 1000 dollars (+ 200 dollars de frais… cheur) l’acte manqué !

Le champion « vitrine »

Monsieur Duclos est éleveur. Il produit des chiens de berger depuis des années. Un jour, il tombe en admiration devant un mâle au hasard d’une rencontre. Après quelques minutes de discussion, le chien en question devient un étalon potentiel. La saillie est réalisée quelques semaines plus tard sur l’une des chiennes de l’élevage, alors que le père de la portée est sans papiers, non confirmé et surtout, démuni de toutes informations quant à son cursus…
Peu importe, lorsque la portée naît, le contrôle ADN n’étant pas une obligation, le père « officiel » de la portée sera un mâle de l’élevage, un « juste confirmé ». Quelques semaines passent, 61 jours exactement, et au sein de la portée, l’éleveur est bien décidé à « garder » quelque chose. C’est chose faite quelques semaines plus tard. Le chiot en question devient un superbe mâle fauve avec un sacré pedigree « officiel ». Au fil de ses premières sorties, il accumule les victoires. Rapidement, les éleveurs lui amènent leurs femelles à la saillie. De même, toutes les femelles de l’élevage sollicitent ses services. Les demandes de chiots sont supérieures à l’offre. Cinq ans plus tard, le mâle en question devient aveugle. De nombreux descendants sont atteints de cette malformation… Deux ans plus tard, l’éleveur arrête son élevage pour se consacrer à ses poules…

Le champion à répétition

Monsieur Stud est un restaurateur passionné d’élevage. Il possède deux ou trois lices issues de grands champions allemands. Comme bon nombre de ses confrères, il n’hésite pas à se rendre en Allemagne, afin de faire couvrir ses femelles par l’étalon du moment. Dans l’une des portées naît un futur crack. Un superbe mâle, à l’empreinte, type et mouvement proches de la perfection. C’est l’illustration vivante du standard. De victoires en victoires, le grand chien plait.

A un tel point qu’il gagne cinq années de suite le championnat. Des dizaines de saillies plus tard, le champion a du mal à trouver la relève. Il a tout gagné, presque « tout sailli » mais aucun de ses descendants n’est à la hauteur des qualités de son géniteur. Quelques années plus tard, l’étalon disparaît. Vingt ans plus tard, aucune lignée directe ne peut se vanter de descendre de ce chien considéré, à l’époque, « comme un champion d’exception ». Pendant ce temps, certains de ses concurrents, qui piaffaient d’impatience pour recevoir le titre, ont disparu physiquement, mais sont bel et bien là dans l’élevage contemporain. Leurs arrières-arrière - arrière – arrière – arrière – arrière – petits- enfants peuvent attester de la qualité de leur lignée, qui n’était pourtant pas celle d’un champion…

Du côté des CH CS... de la S.C.C

Chaque année, la Société Centrale Canine publie les titres de Champions de France de Conformité au Standard homologués l’année précédente.
Si, théoriquement, il n’y a que quatre titres possibles (deux en mâles et deux en femelles avec les CACS attribués lors des deux championnats) ce nombre est en réalité beaucoup plus important dans les races où les tailles, poids, poils et/ou coloris entrent en ligne de compte (c’est le cas du Caniche, du Teckel ou du Dogue Allemand où chaque CACS attribué devient un champion en puissance).

Concrètement, si nous prenons les chiffres bruts, il semble beaucoup plus difficile pour un éleveur d’accrocher un titre de Champion de France de Conformité au Standard au palmarès de son élevage qu’un titre de Champion International de Beauté.

Dans cette logique, les Français n’hésitent plus à étendre leur champ d’investigations en allant chercher les titres de champions chez nos voisins européens : Luxembourg, Belgique, Allemagne, Italie, Espagne, Portugal, Suisse, etc. sont leurs cibles favorites et permettent également de leur ouvrir de nouveaux marchés.

Certains n’hésitent pas à changer de continent en confiant « leur champion » à des handlers américains, en mettant « en station » leur champion dans un élevage canadien ou chez un éleveur américain. Au demeurant, cette course au (x) titre (s) est loin d’être une spécificité tricolore…

Existe-t-il des alternatives au modèle français ?Actuellement, les systèmes de championnat en vigueur dans le monde cynophile reposent sur plusieurs modèles :

Le modèle AKC (américain) instauré par « American Kennel Club ». Cet organisme demeure, rappelons-le, le plus important organisme d’enregistrement de chiens de races dans le monde, avec, en moyenne, 1,3 millions de pedigrees délivrés chaque année. L’attribution d’un titre de champion est basée sur un système de points prenant en ligne de compte le nombre de concurrents par race et par exposition. Chaque année, l’AKC publie la liste des races qu’il reconnaît, les pointages par Etat (Californie, New-York,…) et le nombre de points selon le nombre de concurrents inscrits à l’exposition. Chaque winner (mâle et femelle) se voit attribuer un nombre de points (entre 1 et 3). Lorsque le candidat au championnat américain cumule 15 points, les services de l’AKC lui décernent automatiquement le titre de AKC Champion.

Résultat, dans certaines races, Labrador, Rottweiler, Cocker Américain, plusieurs centaines de titres sont attribués chaque année. Le titre de champion est un culte auquel aucun éleveur américain n’échappe. De là à se poser des questions sur leur valeur… il n’y a qu’un pas !

Preuve de ce « culte du champion », la Westminster, une exposition prestigieuse organisée chaque année par le Westminster Kennel Club qui réunit pendant une semaine 2500 champions, majoritairement d’élevage américain, qui ne comptent plus les victoires de groupes (Group 1st) et les Meilleur de l’exposition (Best in Show). Certains chiens, comme la célèbre Tryst of Grandeur, font partie du « Club des 100 », des chiens qui peuvent aligner plus de 100 Best in Show sur le circuit américain !


Le modèle Kennel Club (britannique) :

Les Britanniques qui sont à l’origine de la cynophilie moderne (standard, clubs de races, organisation, sélection…) ont une méthode « bien à eux ». En effet, outre-Manche, la carrière d’un futur champion démarre peu de temps après sa naissance. Faire ses classes avant d’inscrire un chien en championnat y est une méthode largement éprouvée. Les expositions de championnat proprement dites, (Championship show) sont les passages obligés pour les champions en herbe puisque ce sont les seules où le Challenge Certificate est attribué (un en mâles, un en femelles). Il faut trois CC’s pour homologuer un titre de champion anglais. Les calendriers des expositions de championnat sont publiés deux ans à l’avance avec un jury déterminé par race. Un même juge ne peut juger deux expositions de championnat deux week-ends d’affilée.


Le modèle allemand (VDH) : l’Allemagne est actuellement le pays où les titres de champions pleuvent. Vous avez, d’une part, les titres inhérents aux Clubs de races (Klubsieger, …), les championnats toutes races régionaux (Saarland Sieger, Wurtemberg Sieger), les championnats spéciaux (Mémorial, …), l’exposition de championnat (le Bundessieger, sigle BS), le Championnat d’Europe (European Sieger, sigle ES) et d’autre part, les titres homologués par le VDH, la Société Centrale Canine allemande (VDH Champion). Difficile pour un non-initié de s’y retrouver dans un tel maquis…

La valeur de ces titres.
D’un championnat « toutes races » au Mondial « de la race »


Chez les éleveurs, la valeur d’un titre est différente d’une race à l’autre, d’un pays à l’autre, voire d’une région à l’autre… L’apprenti éleveur, bardé des meilleures connaissances cynotechniques et surtout d’intentions louables est comme jeté en pâture lorsqu’il débute en championnat, certains faisant « cynopholie ».

Pour ne pas devenir « cynophobe », l’éleveur qui a entre les mains de quoi apporter sa pierre à l’édifice ne doit surtout pas être laissé seul mais épaulé par des « routiers du circuit ». Sous peine, d’être rapidement écoeuré et de quitter la cynophilie aussi vite qu’il y est entré.




La cynophilie se mondialise, les champions fleurissent et les plus grands champions contemporains ont comme théâtre d’opération les cinq continents. Mais en parallèle à cette internationalisation des championnats, une course aux titres, vulgairement surnommée « championnite », se développe.


De facto, ce constat nous oblige à nous poser des questions de fond sur les méthodes actuelles de sélection et le devenir de nos champions.

De surcroît, cette course aux titres atteint des sommets… financiers !
Le syndrome du champion existe depuis les premiers pas de la cynophilie moderne. Mais reconnaissons que l’arrivée de nombreux pays dans la cynophilie, leur entrée comme membre fédéré ou membre associé au sein de la Fédération Cynologique Internationale a multiplié d’autant le nombre de championnats et donc le nombre de champions.

Mais, bien plus que les titres, le seul élément qui nous permette d’évaluer la justesse du choix des juges repose sur l’étude et le suivi des lignées, très souvent, des années après que le champion en question ait été retiré de la reproduction.

Commençons par une « petite analyse chiffrée » La cynophilie française peut se targuer de ne pas suivre la méthode inflationniste de quelques-uns de ses voisins européens, l’Allemagne en particulier où les titres de champions nationaux et régionaux poussent comme des champignons. Pour devenir Champion de France de conformité au standard, le postulant ne dispose pas d’un grand nombre de possibilités : soit il répond aux exigences assorties du CACS de la Nationale d’élevage organisée par son Association de race, soit il remporte le même certificat lors du Championnat de France de Conformité au Standard, sous la houlette de la Société Centrale Canine. Ce qui n’empêche pas certains chiens d’obtenir le CACS à ces deux manifestations la même année… et même, plusieurs années de suite. De quoi refroidir d’éventuels candidats au titre !


L’autre élément troublant du système français repose sur le choix des juges. Plus de 1300 juges sont agréés par la Société Centrale Canine. Hors, moins de 10% sont appelés à officier régulièrement et ils ne sont qu’une poignée à officier de manière hebdomadaire… Ce sont souvent ces derniers que l’on retrouve en exposition de championnat ou lors des nationales d’élevage. Autrement dit, le choix des juges en termes de CACS de championnat repose sur le choix des organisateurs d’expositions. Dans plusieurs races, malgré une trentaine d’experts autorisés, ils sont souvent deux ou trois à monopoliser les jurys d’expositions spéciales et de championnat…


Face à cette situation, les éleveurs français sont de plus en plus nombreux à sortir des frontières. Visiblement, ce choix n’a pas l’air de trop mal leur réusssir : la France est le pays n°1 de la Fédération Cynologique Internationale en matière d’homologation de titres de « Champion International de Beauté ».
Les Français et les titres de champion international délivrés par la F.C.I.
Les éleveurs français sont de plus en plus incités à sortir des frontières. Pour preuve, les statistiques de titres homologués par pays confirment cette tendance. En 1990, la FCI a homologué 2005 titres de champion, en 2000, ce sont 3840 chiens qui se sont vu homologué le titre !.


en conclusion

La trilogie du championnat : le standard, le juge et la concurrence

En conclusion, pour faire des champions, vous avez besoin de trois ingrédients fondamentaux : le candidat au titre, des juges et des moyens financiers qui vous permettent de suivre le cursus…

De surcroît, si le candidat présente en plus, une généalogie de renom, des résultats d’examens (hanches, cœur, yeux, coudes, …) corrects, un indice de reproduction (Zuchtwert,…) très prometteur, alors là, vous avez la perle rare.

Bichonnez-la, caressez-la, dorlotez-la, ils adorent ça… Lorsque ses premiers descendants confirmeront son potentiel génétique, alors vous serez le roi, sauf que dans cette histoire, le grand champion vieillit mal, ne se reproduit que peu ou prou, et qu’avec tout cela, il risque même de condamner la réputation de votre sélection… A ce moment-là, peut-être, l’humilité aura gagné vos neurones, et vous recommencerez à zéro en repartant sur des ambitions réalistes. Cette course aux titres génère des us et coutumes que la morale réprouve.

Dans la Trilogie du Champion, quel est votre choix ?- Spéculer sur ses titres afin de le revendre le plus cher possible.
- Le faire reproduire à « qui mieux mieux » et en faire le porte-drapeau de tout ce que vous n’osez pas exposer.
- Faire en sorte qu’il joue son rôle d’améliorateur avec une descendance saine et en bonne santé qui donne satisfaction aux acquéreurs…
Allez, bonne méditation !
Courtoisie Société Francophone de Cynotechnie, SFC.
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